VERRE (ART DU)

VERRE (ART DU)
VERRE (ART DU)

Le verre est une des matières les plus fragiles, qui a pu pourtant, depuis 3 500 à 4 000 ans, alliant l’utile à l’agréable, renaître ici ou là, pour reprendre une grande importance, après des éclipses dues probablement plus à des événements historiques qu’à une réelle désaffection. Dans cette longue histoire, certaines périodes sont encore peu connues, voire inconnues, et il faut s’attendre à ce que de nouvelles découvertes apportent enfin une réponse à des questions posées depuis longtemps: les origines du verre sont-elles encore plus lointaines qu’on ne le pense aujourd’hui? Où faut-il situer l’invention de cette matière qui, parfois, peut apparaître sans aucune intervention humaine, comme ce verre naturel, appelé « obsidienne », le seul qu’ait connu la civilisation précolombienne?

Avant que des certitudes ne viennent remplacer toutes les suppositions, il est déjà possible de donner quelques repères peu contestables dans l’histoire du verre: au cours d’une première période, s’étendant jusqu’aux abords de l’ère chrétienne, l’industrie du verre reste prisonnière de petits moyens de fabrication; ses productions se limitent à de menus objets destinés surtout à la parfumerie, aux onguents ou encore à la décoration.

Ensuite, le verre, grâce au soufflage à la canne, servit à fabriquer des objets de grande dimensions et ses cadences de production lui permirent de concurrencer la céramique et le métal.

Cette expansion durera près de huit siècles en Occident avant d’entrer dans un Moyen Âge en grande partie encore inconnu. Par contre, en Orient, la fabrication du verre reste intense et Venise n’aura aucune peine, après la chute de Byzance (XIIIe s.), à introduire dans le monde occidental des procédés techniques, des formes et des décors pour les imposer sur le marché européen après une bonne préparation commerciale. L’attrait de cette production se prolongera jusqu’au XVIIIe siècle dans tout l’Occident. Mais elle sera remplacée, vers la fin du XVIIe siècle et surtout au XVIIIe, sur les mêmes marchés, par le verre dit de Bohême, qui sera concurrencé à son tour par le cristal anglais. Le XIXe siècle donnera finalement à l’industrie du verre une nouvelle impulsion, grâce à l’amélioration des procédés de fusion et aux progrès de la chimie. Le XXe siècle achèvera cette évolution en mécanisant les principales fabrications. La science assurera aussi pour une bonne part, pendant le même temps, le renouvellement artistique de la verrerie.

1. Définition et fabrication

Pour une définition détaillée de la structure du verre et de l’état vitreux, on se reportera à l’article VERRE.

Il suffit de rappeler ici que le verre est une substance dure, homogène, isotrope, généralement transparente, et qu’il est obtenu par fusion, vers 1 500 0C, d’un mélange de silice, de carbonate de soude ou de potasse, et de quelques autres matières en quantités moins importantes. Ce mélange se ramollit progressivement sous l’effet de la chaleur en devenant une pâte visqueuse qu’on peut mettre en forme entre 650 0C et 1 000 0C (palier de travail).

Dans les usines modernes, la fusion du verre se fait surtout dans des fours continus à bassin, quoique, pour des petites fabrications, on emploie encore la technique ancestrale de l’élaboration du verre en creusets obtenus à partir d’argiles convenablement choisies. Les creusets anciens avaient la forme et la dimension de saladiers. Par la suite, ces creusets sont devenus des pots, souvent de grande capacité. Ils sont introduits dans des fours, où le mélange vitrifiable est transformé en verre fondu et porté, pendant plusieurs heures, à une température supérieure à 1 400 0C. Celle-ci est poussée ensuite aux environs de 1 500 0C, afin d’affiner le verre et d’en dégager les bulles. La température est ramenée alors lentement jusqu’au niveau qui permettra la mise en forme.

La conduite de ces opérations de cuisson exigeait des qualités peu communes de la part des verres anciens pour obtenir du verre homogène à partir de matières premières variables et avec des fours chauffés au bois, dont la température ne pouvait dépasser 1 300 0C.

À cet égard, il est clair que les verriers de l’Antiquité, qui utilisaient les mêmes techniques d’élaboration du verre que nos verriers avant l’adoption des fours à charbon et ensuite à gaz, ont connu des difficultés du même genre et parfaitement imaginables. Il n’en va pas de même pour les techniques de mise en forme du verre, avant l’époque du soufflage à la canne dont l’invention – ou en tout cas l’utilisation courante – est très tardive: quelques décennies à peine avant l’ère chrétienne. Cette première époque, longue environ de deux millénaires, pose encore bien des problèmes pour l’archéologue. Les connaissances actuelles sur les centres verriers de l’Antiquité et sur leur évolution laissent aussi encore beaucoup à désirer.

2. La verrerie antique avant l’invention du soufflage

Il convient de faire le point sur les recherches en cours pour remonter aux origines de l’industrie du verre, problème qui préoccupe depuis quelques décennies historiens, archéologues, chimistes et même philologues.

Premiers objets

Pour le moment, il semble établi qu’on a trouvé en Égypte, ainsi qu’en Mésopotamie, des récipients, vraiment en verre, datant de la fin du XVIe ou du début du XVe siècle avant J.-C.

Il est plus difficile de se prononcer à propos de périodes plus anciennes qui ont laissé des perles, des amulettes ou autres menus objets que les archéologues ont attribués aux verriers, et qui auraient pu être fabriqués par d’autres artisans à partir de matières assez voisines du verre par leurs constituants (silice, chaux). Des chimistes ont fait remarquer, à ce propos, que les frontières pouvaient être vite franchies entre le verre et ce qu’on appelle la glaçure, la couverte, la fritte, la faïence égyptienne, etc.

Or, il se peut qu’en cours de fabrication certains de ces matériaux se soient transformés accidentellement en verre. Il ne faut donc pas confondre ce genre de verre avec du verre fait intentionnellement.

En examinant quarante-deux de ces objets anciens, censés être en verre – des perles pour la plupart –, H. C. Beck (Glass Before 1500 B.C. ) a pensé que dix-sept seulement d’entre eux sont réellement en verre; la datation de ces objets s’échelonne de 2500 à 2000 avant J.-C.; H. Frankfort a signalé, en outre, un fragment de baguette en verre, trouvé à Eshnuna, et qui daterait de 2500 avant J.-C.

Il importe de souligner qu’il s’agit toujours de petits objets isolés qui peuvent ne pas avoir été trouvés dans leur contexte d’origine, et dont la fabrication n’exigeait pas une technique très avancée.

Premiers récipients en verre (du IIe millénaire à notre ère)

Le procédé de fabrication des récipients en verre, avant le soufflage, est connu grâce à la découverte, par Flinders Petrie, des ruines d’une fabrique de verre à Tell-el-Amarna, au temps d’Aménophis IV (vers 1400 av. J.-C.). Cette description, publiée par Petrie (Les Arts et métiers de l’Ancienne Égypte , 1925), a permis de mettre fin à bien des affirmations téméraires faisant, entre autres, remonter à la plus haute antiquité le soufflage du verre à la canne. Elle ne résout du reste pas tous les problèmes. Certains verriers ont en effet tenté de réaliser des objets de verre en suivant la description de Petrie et n’y sont pas parvenus. Il y avait donc probablement, en outre, certains tours de main, voire d’autres secrets.

Voici ce texte capital concernant le premier mode de travail du verre, par coulée autour d’un noyau de sable ou de céramique, détruit ensuite par émiettement (d’où son nom de sand core en anglais):

«Pour faire le corps même du vase, on choisissait d’abord un mandrin de cuivre légèrement conique de l’épaisseur du col. À l’extrémité de ce mandrin, on modelait, en pâte siliceuse, un modèle de la dimension et de la forme du vase projeté. Ce modèle était maintenu au mandrin au moyen de chiffons, dont on voit parfaitement la trace, ainsi que des liens sur la surface inférieure de certains vases retrouvés. On mettait une première fois au four afin de chauffer et de donner à la pâte une certaine consistance. Ensuite commençait le travail du verre. On l’étendait en couches répétées et égales qu’on réchauffait aussi souvent qu’il était nécessaire, de manière à rendre la surface aussi unie que possible. On décorait ensuite au moyen de fils de verre de couleurs diverses que l’ouvrier entremêlait à son gré en ayant soin toutefois de rouler, de temps à autre, le tout sur une surface bien polie, de manière à faire pénétrer les fils de couleur dans la première couche de verre et à obtenir ainsi une surface unie sans aspérités. Les anses et le pied se travaillaient séparément et étaient appliqués au moyen de verre en fusion. On laissait refroidir jusqu’à ce que le mandrin en cuivre fût suffisamment contracté pour être retiré sans effort. La pâte tendre, finalement débarrassée de son support, se réduisait alors facilement en miettes et pouvait sortir par le goulot en renversant le vase. Il est à remarquer qu’on ne recourait jamais ni au frottement ni au polissage; la surface extérieure restait telle qu’elle sortait de la fusion. On employait un procédé semblable pour la fabrication des perles.»

Ce mode de fabrication est apparu à peu près simultanément – vers la fin du XVIe siècle avant J.-C. – en Égypte et en Mésopotamie; on ne sait qui en est l’inventeur, peut-être un troisième pays. Petrie pensait qu’en Égypte le verre avait tout d’abord été importé. Par ailleurs, certaines découvertes faites en Mésopotamie montrent bien qu’on avait jusqu’ici sous-estimé l’éventualité de fabrications verrières dans ce pays, du fait peut-être que les fouilles n’y avaient pas été menées avec assez de soin, du fait aussi que le verre s’y conserve moins bien qu’en Égypte. Les types de récipients fabriqués dans ces deux pays, et qui imitent les modèles d’autres industries – celle de la céramique notamment –, n’y étaient pas, en tout cas à première vue, très différents.

Des archéologues ont émis l’hypothèse selon laquelle l’Égypte aurait emprunté au Proche-Orient – à la suite des conquêtes entreprises sous le règne de Thoutmès III (1504-1450) – ses techniques de fabrication du verre. Ils expliquent également par des événements historiques (invasion des Peuples de la mer) le fait qu’après une période florissante les productions verrières mésopotamienne et égyptienne semblent avoir été interrompues du XIIe au IXe siècle. Tandis que ce temps mort se prolonge apparemment en Égypte jusqu’à l’époque ptolémaïque, une renaissance apparaît en Asie (Mésopotamie et côte syrienne) et s’étend, après le VIIe siècle, à Rhodes, à Chypre, à la Grèce et à l’Italie.

Le déclin de l’industrie verrière mésopotamienne, vers la fin du IVe siècle, aurait été provoqué par les conquêtes d’Alexandre, de même que le réveil, à la même époque, de l’industrie égyptienne, entre autres à Alexandrie. Ce centre et celui de la Syrie auraient été les plus actifs durant les derniers siècles avant notre ère, préparant ainsi un terrain particulièrement favorable aux industriels du verre qui devaient par la suite s’installer en Occident.

Les flacons réalisés à partir d’un noyau ne dépassaient guère une vingtaine de centimètres et servaient vraisemblablement à l’emballage d’onguents. Leur diffusion dans le monde antique est attribuée, généralement, au commerce phénicien. Quant aux formes, elles ont évolué en même temps que celles de la céramique dont elles dépendaient étroitement (elles sont connues sous les noms de: alabastre, amphorisque, aryballe, œnochoæ, unguentaria, etc.).

Autres objets

Avant l’invention du soufflage, la fabrication de certains objets en verre a nécessité pourtant le recours à d’autres techniques. Il se peut que des pièces aient été obtenues par la taille à froid dans un bloc de verre, comme le sont les œuvres creusées dans le cristal de roche. Dans d’autres cas – bols, plats, statuettes, etc. –, l’artisan se serait servi du procédé dit de la cire perdue, ou du moulage en moules fermes ou ouverts.

Des fouilles ont révélé qu’il fallait attribuer à ces époques anciennes des inventions qu’on n’imputait, jusque-là, qu’aux verriers de l’époque romaine. Ainsi, des découvertes faites en Mésopotamie et en Iran montrent que le verre mosaïque, qui passait pour une spécialité d’Alexandrie (Ier siècle av. ou apr. J.-C.), était déjà connu vers 1500 avant J.-C. Cette technique consiste à fabriquer une sorte de marqueterie à partir de baguettes de verre de différentes couleurs, groupées côte à côte, étirées ensemble et coupées en tranches de façon à en répéter le motif. Une autre découverte a montré que les verres dits à feuille d’or, ou verres chrétiens, avaient des ancêtres déjà au IIIe siècle avant J.-C. Ces verres sont composés d’une feuille d’or décorée, emprisonnée entre deux couches de verre finalement soudées par les bords. Cette énumération n’est évidemment pas exhaustive.

3. La verrerie soufflée. Époque de l’Empire romain (Ier-IVe s.)

L’époque de l’Empire romain est la seconde étape de l’industrie du verre et de beaucoup la plus importante. Elle créa, peu avant le début de l’ère chrétienne, le verre à bon marché, lui assurant ainsi une très large diffusion. La littérature de l’époque, quoique abondante, ne mentionne pas cette invention du verre soufflé. Seules les fouilles peuvent donc apporter quelques rares précisions. C. Islings (Roman Glass ) a signalé ainsi la présence d’un objet en verre soufflé dans une tombe étrusque à Toscanella, ce qui pourrait faire remonter le procédé au IIe ou Ier siècle avant J.-C.; il a ajouté cependant que le verre soufflé ne devint pas populaire avant le temps d’Auguste. D’autres auteurs ont avancé, mais sans preuves tangibles, des dates plus anciennes.

Le procédé de soufflage ne tarda pas à se répandre comme le montrent des textes contemporains, les fouilles et quelques inscriptions. Parmi les centres verriers les plus célèbres, on indiquera, en Égypte, ceux d’Alexandrie et de Diospolis; au Proche-Orient, ceux de Syrie, de Phénicie et de Palestine; en Italie, ceux de la région de Volturno, de Rome, d’Aquileia; ceux d’Espagne, de Gaule, de Cologne, d’Utrecht, de Dalmatie, d’Athènes, de Chypre, etc.

Certaines de ces productions sont signées et peuvent donc être attribuées à des centres déterminés. On suppose pourtant que des firmes orientales ont créé rapidement en Occident des succursales portant leur nom (Ennion, par exemple, dont on a trouvé des œuvres aussi en Italie). Mais il est intéressant de constater que les mêmes types de verre et de décors se retrouvent un peu partout dans l’Empire romain, soit qu’ils deviennent vite à la mode et donnent lieu à la fabrication de copies par d’autres verreries, soit que le commerce extérieur, particulièrement actif et suffisamment bien organisé, puisse assurer une large diffusion des produits.

Après A. Kisa (Das Glas im Altertume ), Morin-Jean (La Verrerie en Gaule sous l’Empire romain ), G. A. Eisen (Glass ) et d’autres encore, C. Islings a dressé un catalogue minutieux des types de verre créés au cours des quatre premiers siècles de l’ère chrétienne. Ce répertoire retient cent trente-quatre formes qui sont, en général, fortement influencées par les modèles de la céramique ou de la métallurgie.

Par ailleurs, Pompéi reste pour nous une source incomparable de renseignements. Les fouilles du site donnent une idée assez précise de l’extension prise, déjà en 79 après J.-C., par l’industrie du verre grâce au procédé de soufflage: les objets en verre y sont extrêmement nombreux et variés; ils faisaient partie de la vie quotidienne, peut-être plus encore que de nos jours.

Sur bien des points, pourtant, les connaissances sur la verrerie romaine ont besoin d’être complétées: origine des fabrications, main-d’œuvre, échanges commerciaux, peut-être organisation de la profession – car cette industrie semble avoir été, déjà à cette époque, assez fermée et soucieuse de ses secrets –, tours de mains aussi, car aujourd’hui encore aucune réponse satisfaisante et définitive ne peut être apportée aux questions que pose la réalisation de certaines pièces antiques (diatreta , verre à résille découpée et maintenue au corps du récipient par de fines attaches en verre).

Au cours des cinq premiers siècles de l’ère chrétienne, la verrerie a maintenu un rythme de production extrêmement rapide, diversifiant ses formes et ses décors. Le premier siècle a marqué un goût prononcé pour la verrerie de couleur, les deux siècles suivants préférant le verre incolore. Les IVe et Ve siècles, par suite de l’instabilité politique, ont créé des modèles plus nettement régionalisés, poussant parfois très loin les prouesses techniques.

Il reste difficile encore de démêler, parmi les trouvailles, ce qui est dû aux verreries locales et ce qui a été importé, surtout en provenance des deux centres les plus importants d’alors: la Syrie et l’Égypte. La question se complique du fait que ces centres exportaient aussi de la main-d’œuvre, comme le montrent certains noms de verriers travaillant dans les verreries occidentales. Cet essaimage se retrouvera d’ailleurs plus tard à propos de la verrerie façon de Venise et, ensuite, façon de Bohême, soit qu’il ait été organisé par les firmes elles-mêmes fondant des succursales à l’étranger ou louant des spécialistes à d’autres verreries, soit qu’il ait été le fait d’ouvriers préférant les conditions de travail offertes à l’étranger et désirant échapper à leur milieu. Les réglementations, souvent extrêmement sévères, faites en différents lieux et à différentes époques, pour fixer cette main-d’œuvre verrière, ne se sont jamais montrées efficaces.

On en arrive ainsi assez vite à cette uniformisation de la verrerie sous l’Empire romain, favorisée sans doute et par la pax romana , qui facilitait les communications, et par les possibilités exceptionnelles qu’offrait cette nouvelle technique, permettant une multiplication rapide des formes grâce au soufflage et aux moules.

Dès lors, d’un bout à l’autre de l’Empire, on retrouve la même variété de formes et de décors obtenus par moulage soufflé ou pressé, par modelage avec reliefs ou dépressions, par pinçage, par applications de fils, cabochons ou autres appendices, par taille, sculpture, gravure, meulage ou polissage, par coloration interne avec filigranes, feuilles d’or, mosaïques, millefiori ou autres incrustations, par coloration superficielle, émaillage, peinture, placage en camée, etc.

La plupart des techniques de décoration ont été essayées à cette époque, mises au point et léguées aux générations futures. Certaines d’entre elles sont même si perfectionnées, si extraordinaires (diatreta , par exemple), qu’elles posent encore aux verriers de nos jours des énigmes insolubles.

4. Le Moyen Âge occidental

La chute de l’Empire romain et les invasions du début du Ve siècle amenèrent une sorte de rupture, pour la première fois, dans cette vaste communauté de la verrerie antique. À partir de ce moment, les verreries de Gaule, de Rhénanie, de Grande-Bretagne principalement vont se faire connaître par une production spécifique dans laquelle on a voulu voir une dégénérescence: la matière est souvent plus translucide que transparente, tachée de traînées violettes dues au manganèse; le répertoire des formes est extrêmement réduit et ne dépasse pas la quinzaine; les décors sont obtenus par des méthodes primitives.

Cette verrerie est caractérisée par des bols arrondis mais surtout par des gobelets coniques en forme de cornets apodes ou à très petit pied; en forme de clochettes à fond arrondi, parfois avec un bouton symbolisant l’amorce d’une tige; ou encore en forme de cornes à boire. De cette époque datent aussi les Rüsselbecher , ou vases à larmes, verres portant sur la panse des excroissances creuses en forme de trompe (France, Angleterre, Allemagne), chefs-d’œuvre d’une technique verrière avancée encore active au VIIIe siècle. Quant à la décoration, elle est faite surtout de filets appliqués, de cabochons, de larmes, de festons, en verre blanc ou de couleur, ou en émail blanc plus ou moins intégrés dans la pâte.

Ces objets ont été trouvés en nombre assez important dans les tombes franques ou mérovingiennes, particulièrement en Allemagne occidentale, dans le nord de la France, en Belgique, en Angleterre, en Scandinavie où le mobilier funéraire est resté plus longtemps à l’abri, de nouvelles prescriptions chrétiennes interdisant la présence d’objets d’usage domestique dans les tombes. Cette interdiction paraît avoir été strictement appliquée aux époques romane et gothique, faisant disparaître désormais la verrerie de son refuge privilégié.

La verrerie a laissé pourtant ailleurs des traces de survie: ainsi, dans la littérature contemporaine, un manuscrit conservé au mont Cassin comprend la miniature souvent reproduite d’un four de verrier (copie de 1123 du De originibus rerum de Hrabanus Maurus, écrit vers 856); un certain nombre de recettes ont été transmises par le traité du moine Théophile, Diversarum artium schedula , œuvre du XIIe siècle, et par le De coloribus et artibus Romanorum , œuvre d’un autre moine romain vivant peut-être au même siècle.

Ici et là, on retrouve aussi quelques rares objets ayant échappé par hasard à la destruction, et des fouilles méthodiques ont mis au jour des débris que l’archéologie a trop longtemps négligés. Le verre était donc plus utilisé au Moyen Âge qu’on ne le croit. Une étude attentive de l’iconographie de l’époque amène à la même conclusion.

On savait déjà, par de nombreux récits, que l’industrie du verre à vitre n’avait cessé d’être très active depuis Grégoire de Tours; on vitrait les églises, les cloîtres, certaines demeures seigneuriales, puis les bâtiments municipaux. Cela suppose une activité similaire des artisans du verre creux.

Mais il est encore trop tôt pour pouvoir reconstituer le trésor des formes de ces époques, comme on a pu le faire, grâce aux tombes, pour la verrerie jusqu’au VIIIe siècle.

Avant de retrouver en Europe une industrie du verre aussi prospère, aussi riche de formes et de décors qu’à l’époque de l’Empire romain – ce nouveau départ étant donné par Venise vers la fin du XVe siècle –, il faut revenir en Orient où les anciennes traditions s’étaient mieux conservées.

5. La verrerie orientale depuis le IVe siècle après J.-C.

Les deux centres les plus importants de l’industrie verrière orientale sous l’Empire romain étaient l’Égypte et la Syrie qui avaient, sous bien des aspects, partie liée avec l’industrie occidentale.

Il est difficile de suivre l’évolution de ces centres après que Constantin eut, en 330, abandonné Rome pour Byzance. On sait, en tout cas, qu’il y avait des verriers dans cette ville où se trouvait une porte à leur nom; l’empereur, en 337, les avait dispensés d’impôt personnel. Le Code théodosien (438) et l’empereur Justinien (527-565), confirment à leur tour la présence de ces verriers, désignés par l’expression visa vitrea conflantes. Plus tard encore, le moine Théophile insistera sur les fabrications des Grecs qui décorent les gobelets de verre avec de l’or et de l’argent, et réalisent de précieux verres à boire avec des pierres couleur saphir (mosaïque de verre bleu), décorés de feuilles d’or représentant des personnages, des animaux ou des feuillages. Ils font aussi des bouteilles à long col, ornées de filets et d’anses et des verres de diverses couleurs.

Cet éloge des verriers grecs montre qu’ils excellaient encore dans certaines pratiques de la verrerie antique: dorure, application sous couverte de feuilles d’or, émaillage, coloration de la pâte, filigranes en relief.

Cette verrerie de grande magnificence a servi de point de départ à la verrerie arabe.

Cela explique qu’on ait souvent attribué à Byzance certaines des pièces d’apparat conservées dans les trésors d’églises et surtout celles du trésor de Saint-Marc à Venise, pièces qui auraient été rapportées de Byzance lors de la prise de la ville par les croisés en 1204.

À défaut de textes contemporains, certaines fouilles entreprises en Perse et en Mésopotamie, certains objets conservés en Europe depuis le Moyen Âge ont attiré l’attention sur la Perse et la Mésopotamie de l’époque sassanide, et ont fait penser à une renaissance de la verrerie dans ces pays. Il s’agit d’objets obtenus par soufflage dans des moules, ornés d’applications ou taillés à facettes, techniques déjà connues et qui seront encore utilisées à l’époque islamique.

La pièce la plus célèbre de l’époque sassanide est la coupe de Chosroès Ier, roi de Perse (531-579), conservée au département des Monnaies, Médailles et Antiques à Paris, et qui aurait appartenu à Charlemagne. Elle est formée d’une feuille d’or découpée et ornée, entre autres, de losanges en verre moulé de couleur vert émeraude. Le médaillon central, en cristal de roche taillé, représente le roi sur son trône.

Au VIIe siècle, les conquêtes arabes (Égypte, Syrie, Mésopotamie et Perse) amenèrent une période florissante pour l’industrie verrière de ces pays et une certaine uniformisation en accord avec la politique d’intégration culturelle poursuivie par l’Islam. Ces productions verrières sont couramment désignées sous le nom de verreries arabes, ou verreries islamiques. Grâce à certaines relations (envois de cadeaux en Occident, récits de voyages, descriptions d’Inventaires), on connaît les principaux centres de production du monde arabe: ainsi, au début du XIe siècle, Henri II, empereur d’Allemagne, envoyait à un abbé de Cluny un vase en verre très précieux de l’art d’Alexandrie. Un voyageur persan du XIe siècle confirme qu’on fabrique au Caire du verre transparent qui ressemble à l’émeraude, et qu’on y vend couramment des bouteilles. On apprend aussi qu’à La Mecque il y a quatre fenêtres de verre pour empêcher la pluie de pénétrer. D’autres voyageurs situent des verreries prospères à Alexandrie, au Caire, en Perse, à Sour (ancien Tyr), à Alep, à Antioche, à Damas, à Tripoli.

Des fouilles ont montré que le goût des verres taillés des VIe et VIIe siècles, de Perse ou de Mésopotamie, s’était maintenu dans ces pays pendant plusieurs siècles et qu’il passa en Égypte et en Afrique du Nord – peut-être même en Biélorussie. On y aurait trouvé des fragments de verre taillé à la façon du cristal de roche, connu sous le nom de verre Sainte-Hedwige et jusque-là attribué à l’Égypte du XIIe siècle. On prête aussi à l’Égypte, et parfois à la Syrie, un mode de décoration à la peinture dite lustrée (XIIe siècle), ainsi que le verre à l’or fixé au feu.

La verrerie orientale la plus célèbre, désignée sous le nom de verre de Damas, est décorée plus ou moins richement d’émaux en épaisseur rehaussés de dorures. Elle date surtout des XIIIe et XIVe siècles. Actuellement, elle est surtout connue et admirée grâce à l’importation des lampes de mosquée. Ce décor d’émaux, d’une rare perfection technique, se retrouve sur des gobelets évasés, des hanaps, des bouteilles à long col, des gourdes; les croisades les avaient fait connaître en Occident au Moyen Âge et ils sont mentionnés dans la plupart des Inventaires du XIVe siècle, sous les noms de verrerie «ouvrée» ou «painte» en façon de Damas ou encore «painte à la morisque».

Après l’invasion mongole, l’industrie du verre renaît en Perse, vers la fin du XVIe siècle, mais Chardin rapporte que cette production était de qualité médiocre, à l’exception peut-être des verreries de Shiraz. La Perse exportait du verre surtout en Inde où des verreries ne furent créées que tardivement.

On connaît encore très mal les origines et l’histoire de la verrerie chinoise. Des perles en verre ont été trouvées dans des tombes des IVe et IIIe siècles avant J.-C. La Chine importa du verre de l’Empire romain. Peut-être les premières productions autochtones apparaissent-elles aux alentours du Ve siècle après J.-C. On cite des statuettes en verre fabriquées du VIIe au IXe siècle. En 1680, une verrerie s’installa à Pékin; elle travaillait encore au XVIIIe siècle, s’adonnant surtout à l’imitation d’objets en matière précieuse (jade notamment).

6. Le verre de Venise et le verre façon de Venise

Un fait nouveau devait modifier considérablement les données de l’industrie verrière occidentale: c’est l’accaparement par Venise, après la chute de Byzance en 1204, des techniques verrières orientales, leur implantation à Murano, la diffusion de ces nouvelles fabrications en Europe.

Cette opération politico-économique a été savamment montée et menée à bien. La domination industrielle et artistique de la verrerie vénitienne s’affirma vers la fin du XVe siècle, s’étendant ensuite rapidement à tout l’Occident où elle se maintint jusqu’au XVIIIe siècle.

Dans un premier temps, Venise prit soin d’acclimater sa conquête à Murano, de la protéger en édictant des mesures de sauvegarde contre la divulgation des procédés de fabrication, contre l’exportation des matières propres à faire le verre, mesures qui transformèrent bientôt l’île en ghetto pour verriers. Les fabrications furent organisées en différents groupes sous un régime de division du travail: la verroterie, les émaux, les verres et cristaux, les vitres et glaces.

Venise se fit connaître tout d’abord par ses exportations de verroteries (perles, bijoux en verre, pierres de couleurs) qui furent réellement à l’origine de sa fortune, si ce n’est de sa gloire. Elles furent lancées dès le XIIIe siècle, avec un grand succès, sur les marchés d’Orient et d’Afrique qui avaient été prospectés par des voyageurs audacieux dont le célèbre Marco Polo.

La renommée des verres et cristaux vénitiens ne s’imposa que plus tard. Les premières livraisons (en Flandres, à Vienne, à Cracovie) sont signalées au XIVe siècle; elles venaient peut-être d’Orient. Mais, au XVe siècle, il commence à être beaucoup question de cette verrerie d’art vénitienne dans les récits du temps et dans les Inventaires, comme ceux des ducs de Bourgogne.

Ce sont des verres dits colorés ou de couleur, émaillés de sujets, garnis d’or et de perles «ouvrez à personnages» à la mode d’Italie; on les appelle déjà de cristal ou cristallins. Il y a des pots, des coupes, des plats, des bassins, des aiguières.

La renommée de cette verrerie vénitienne est donc déjà internationale; elle commence aussi à provoquer des convoitises dans tous les pays où elle est exportée, et ces derniers, au cours des XVIe et XVIIe siècles, vont s’organiser pour faire du verre façon de Venise. En Italie même, de nombreuses verreries avaient été établies à l’instigation, souvent, de verriers vénitiens. Venise n’arrivera pas à arrêter cet exode de sa main-d’œuvre ni l’imitation de ses modèles. On fera du verre façon de Venise à Nevers, à Lyon, à Saint-Germain-en-Laye, à Rouen, à Bruxelles, à Anvers, à Liège, à Londres, à Barcelone, à Cologne, à Cassel, à Vienne, etc.

Tous les procédés usités à Murano furent ainsi employés en France, dans les Flandres, en Allemagne, en Angleterre, en Espagne.

Ils sont connus par les contrats passés entre les verreries et cette main-d’œuvre spécialisée.

Le répertoire comprenait les verres «qui se font ordinairement» et les verres extraordinaires. Ils étaient à boutons, à bagues, à olives, à branches, à chaînettes, à mascarons, à anneaux, à serpents, à fleurs, à bêtes.

Les jambes moulées à la vénitienne représentaient des mufles de lion, des rosaces à perles ou d’autres reliefs. Sur ces différentes jambes, le verrier, selon les commandes, montait des coupes en forme de calice, de cloche, de bol, de flûte, de coquille, ou confectionnait des ciboires, des vases, des pots, des aiguières, des bocaux. Des tasses de verre étaient façonnées en toutes sortes de formes: nef, cloche, cheval, cerf, oiseau, église. Les parois étaient en verre lisse ou craquelé, à côtes torses dites vénitiennes. Toutes les couleurs étaient offertes, y compris celles imitant la porcelaine, les pierres précieuses, le jaspe. Des décors à filigranes, à l’émail, à l’or et la gravure au diamant sont couramment employés.

À bien des points de vue, la verrerie vénitienne représente un retour à la verrerie des premiers siècles de l’ère chrétienne, avec quelques acquisitions nouvelles dues à l’Orient probablement.

Elle répondait bien en cela au goût de la Renaissance pour l’Antiquité!

7. La verrerie d’Allemagne et de Bohême

Avant de prendre, avec la Bohême, le relais de Venise sur le marché européen du verre, l’Allemagne avait adopté, vers le XIVe siècle, un type de gobelet vert, à appendices, peut-être dérivé du Rüsselbecher de l’époque mérovingienne. Ce verre a donné le Römer , verre à vin du Rhin classique, et d’autres genres de verres décorés de façon analogue: pastillages, cabochons en forme d’épines ou à grains, cordons pincés, pieds ficelés. Ce sont les Vidercommes ou Willkomm , les Passglas , les Pokal ou verres à couvercles, etc. Le Römer restera longtemps encore le verre préféré, avec des variantes, en Allemagne et dans les Pays-Bas.

Mais le succès international de la verrerie allemande et de Bohême a d’autres points de départ. Il est dû essentiellement à deux villes, Nuremberg et Prague, qui avaient une vie artistique très développée et qui étaient très ouvertes aux influences étrangères, italiennes surtout, dès la fin du XVe siècle. Nuremberg possédait, entre autres, des ateliers de peintres verriers et de graveurs sur verre célèbres. Prague s’était initiée à la gravure sur cristal de roche, sur pierres fines et sur verre. Du verre léger vénitien, on passa bientôt à une matière indigène plus épaisse qui permettait une gravure et une taille plus profondes. Ainsi naquit le verre de Bohême qui imitait le cristal de roche et qui prit rapidement une extension considérable, nécessitant la création de nombreuses verreries dans les régions les plus propices, c’est-à-dire bien pourvues de bois pour la fusion du verre et d’eau pour la taille et la gravure au tour.

L’impulsion avait été donnée par des Allemands venus de Nuremberg: Gaspard Lehmann, puis Georges Schwanhardt. Le verre de Bohême est d’abord un verre blanc gravé, par la suite taillé à facettes et gravé.

Plus tard, les verriers de ces contrées, pour lutter contre le cristal anglais au plomb, se mirent à faire du verre de couleur gravé et taillé, ce qui donna au verre de Bohême un renouveau qui dure encore.

Le succès du verre de Bohême est dû aussi, peut-être plus encore que celui de la production vénitienne, au sens commercial de ses propagateurs. On a souvent cité ce verrier de Bohême partant de chez lui en poussant sa brouette pleine de marchandise et finalement imposant ses verres décorés de couleurs et taillés en Angleterre, en Italie et même à Istanbul.

L’exportation de verre à vitre fabriqué à partir de manchons, de cristaux pour lustres et de verroteries, est aussi une des réussites de la Bohême.

Quant à l’Allemagne, elle eut d’autres centres de fabrication de verres gravés ou émaillés qui rivalisèrent avec la Bohême mais dont on ne traitera pas ici.

8. La verrerie dans les autres pays européens aux XVIIe et XVIIIe siècles

Après le règne du verre de Venise, puis du verre de Bohême, vint, au XVIIIe siècle, celui du cristal anglais, qui fut de courte durée et dont l’influence fut plus limitée.

Les verreries d’Angleterre furent forcées d’utiliser le charbon à la place du bois, dès le début du XVIIe siècle (1615). Elles furent amenées à adjoindre de l’oxyde de plomb à la masse en fusion pour faciliter la fonte en pots couverts. Ce cristal au plomb offrait une qualité de verre nouvelle, le flint-glass , proche du cristal de roche, par l’éclat et la blancheur mais plus facile à travailler. Il s’imposa sur les marchés au XVIIIe siècle, principalement pour l’éclairage, l’optique et le service de la table. Partout aussi, on chercha à l’imiter. La France y parvint à la veille de la Révolution. Ce fut le point de départ de la cristallerie continentale avec Saint-Louis, Sèvres, le Creusot, Vonèche, Baccarat et le Val-Saint-Lambert.

Auparavant, les verreries françaises, qui avaient travaillé au XVIe et au XVIIe siècle à la façon de Venise, avaient su trouver aux abords du XVIIIe siècle un style nouveau, bien à elles, qui fut modifié par la mode du verre de Bohême, puis par celle du cristal façon d’Angleterre.

C’est à la même époque que la Normandie abandonne, au profit du verre à vitre de Bohême, son procédé ancestral de fabrication de vitres à boudine, ou cive, qui avait fait la célébrité de ce verre appelé aussi «verre de France».

Il convient également de citer cette autre célébrité française de la glace polie que la manufacture royale des glaces de Saint-Gobain ravit d’abord à Venise au XVIIe siècle (glace soufflée), puis à Bernard Perrot verrier d’Orléans (glace coulée sur table, cf. VERRE, chap. 2), pour lui donner la grande audience que l’on sait.

À la même époque, les Provinces-Unies travaillaient à l’italienne, en reprenant pourtant certaines formes allemandes. Elles surent acquérir une grande renommée grâce à une pléiade d’excellents graveurs au diamant (Anna Rœmers Visscher, au XVIIe siècle, et tant d’autres restés anonymes; puis, au XVIIIe siècle, Frans Greenwood, Aert Schouman, David Wolff, etc.).

L’Espagne avait de son côté accueilli très tôt et avec faveur la façon de Venise, après avoir eu ses propres verreries, dont il reste peu de choses. Cette verrerie à l’italienne a par contre laissé beaucoup de souvenirs. Elle comporte une certaine originalité, qu’il s’agisse des verreries émaillées de Barcelone (XVIe s.) ou bien de ces objets à crêtes, à gros filigranes ou autres applications très accentuées; la pâte elle-même était souvent teintée. Des formes particulières en sont sorties comme l’almorratxa (aspersoir à eau parfumée), le cántaro (cruche à eau), le porrón (vase à bec pour boire à la régalade), dont la fabrication s’est prolongée assez avant dans le XVIIIe siècle.

9. Les XIXe et XXe siècles

Le XIXe siècle a été surtout un siècle de progrès techniques avec l’organisation de fabrications massives, grâce à la mise au point de nouveaux moyens de fusion, grâce également à la chimie. Ces recherches se poursuivirent un peu partout et débouchèrent, au XXe siècle, sur la mécanisation pour répondre aux nouveaux besoins nés aux lendemains des guerres mondiales.

Les perfectionnements serviront aussi l’évolution de la verrerie d’art. Ce fut un siècle de gloire pour les grandes cristalleries, qui améliorèrent la qualité de leur cristal et mirent au point de nouveaux moyens de soufflage et de moulage par pression. L’Amérique ne resta pas étrangère à ce développement et ses South Jersey-type, Stiegel-type , ses verres soufflés threemold , ou pressés, sont aussi recherchés que les créations européennes. Elle collabora également au grand renouveau de la fin du XIXe siècle avec son Tiffany’s Favrile Glass .

En France, l’Art nouveau restera marqué des noms de Brocard, de Rousseau, de Léveillé, de Jean, de Daum, et surtout d’Émile Gallé qui poussa lui-même très loin des recherches, souvent avec bonheur. Il faut ajouter à ces noms celui de René Lalique qui fut un des grands décorateurs et innovateurs de l’époque, donnant au verre un rôle nouveau dans la bijouterie fantaisie, dans le bâtiment et dans la parfumerie. Les efforts de Gallé furent repris, vers 1922, par un peintre qui s’improvisa verrier mais n’en laissa pas moins une des œuvres les plus exceptionnelles de l’art du verre: Maurice Marinot (1882-1960).

Par ailleurs, les recherches de la verrerie scandinave, à la matière pure mais un peu froide, ont donné une nouvelle chance à la gravure sur verre et rejoignent les créations des designers de la seconde moitié du XXe siècle. Flavio Poli, à Murano, a poussé à l’extrême cette pureté des formes et de la matière, tandis que Paolo Venini réussissait à redonner enfin à la verrerie de cette île un style nouveau d’une rare distinction.

Les perfectionnements techniques successifs et une mécanisation particulièrement poussée de la fabrication du verre à vitre, de la glace et de la fibre de verre, au XXe siècle, permettent enfin à ces produits de jouer un rôle déterminant dans l’architecture et de lui donner un nouveau visage.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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